La France, une nouvelle place dans le monde

 
  • De 1945 au milieu des années 1970, la France retrouve un rôle international en s’adaptant aux bouleversements du monde : la décolonisation, la Guerre froide…
  • Avant d’accepter la décolonisation, la France mène deux guerres. En 1958, la guerre d’Algérie fait chuter la IVème République et revenir de Gaulle au pouvoir, qui créé la Vème République.
  • La France joue un rôle important dans la construction européenne. Dans la Guerre froide, de Gaulle ne renie pas l’alliance américaine mais il affirme l’indépendance de la France pour en faire une grande puissance (État ayant la capacité d’influencer les autres États) mondiale.

 

Comment, malgré les crises, la France parvient-elle à reconstruire sa puissance extérieure et sa stabilité intérieure entre 1945 et 1974 ?

 

I. La IVe République entre guerre froide, construction européenne et décolonisation

 

A. La fracture de la guerre froide

 

  • Une nouvelle République est fondée. Dès 1944, le Gouvernement provisoire de la République française annule la plupart des lois du régime de Vichy et organise l’épuration (sanctions prises contre les collaborateurs, allant du renvoi à la mort). En 1945, les élections municipales signent la reprise d’une vie démocratique au sein de laquelle les femmes ont désormais le droit de vote. En octobre 1946, la constitution (= ensemble des lois fondamentales fixant l’organisation et le fonctionnement d’un État, ainsi que les droits et les devoirs de ses citoyens) est adoptée : elle donne officiellement naissance à la IVème République. Mais elle compte de nombreux opposants, dont Charles de Gaulle qui refuse un régime parlementaire (régime dans lequel le Parlement investit, contrôle et peut renverser le gouvernement) et se retire de la vie politique.
  • Un nouveau projet de société est aussi élaboré. L’État-providence (forme politique dans laquelle l’État intervient dans le domaine social et économique pour garantir le bien-être de ses citoyens) protège la population contre les risques économiques et sociaux. En octobre 1945, la Sécurité sociale est créée. En 1950, le salaire minimum est adopté. En 1956, une troisième semaine de congés payés est accordée aux salariés. Le deuxième plan (1954-1957) investit dans les équipements scolaires et hospitaliers.
  • Née en 1946, la IVe République est un « régime d’assemblée».  Mais les partis politiques sont divisés : aucun ne possède la majorité à l’Assemblée nationale. Une coalition gouvernementale est mise en place par les principaux partis : le Parti communiste français (PCF), la SFIO des socialistes et le MRP des démocrates-chrétiens. Ils gouvernent ensemble jusqu’en mai 1947 : c’est le tripartisme. La guerre froide empêche tout coalition durable. En mai 1947, le PCF, qui souhaite une politique plus sociale et soutient l'URSS, est exclu du gouvernement.
  • Le retour de la France sur la scène internationale peut avoir lieu. De Gaulle ambitionne de rétablir la France comme une grande puissance mondiale. En 1945, la France obtient un siège permanent au Conseil de Sécurité de l’ONU. En 1945, toujours, la création du Commissariat à l’énergie atomique a pour objectif de retrouver rapidement la puissance militaire grâce à l’arme nucléaire.
  • En 1949, la France accepte l’aide du plan Marshall et entre dans l’Alliance atlantique.

 

B. La France au cœur de la construction européenne

 

  • Le 9 mai 1950, l’un des « pères fondateurs de l’Europe », le ministre des Affaires étrangères Robert Schuman, propose la mise en commun de la production d’acier et de charbon entre la France et la RFA. La Communauté économique du charbon et de l’acier (CECA) est instaurée en 1951 et réunit finalement la France, la RFA, l’Italie, les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg dans une organisation politique supranationale commune et dirigée par une Haute Autorité présidée par Jean Monnet.  Mais le projet de défense commune divise les partis politiques français : l’idée de Communauté européenne de défense (CED) est abandonnée en 1954. En mars 1957, les six pays de la CECA signent les traités de Rome qui créent un marché commun : la Communauté économique européenne (CEE).

 

C. La décolonisation divise les partis politiques

 

  • Les tensions sont fortes entre le PCF et les autres partis au sujet de la guerre d’Indochine (1946-1954) : les communistes prennent parti pour la décolonisation.  C’est au sujet de la guerre d’Algérie (1954-1962) que les tensions politiques sont les plus fortes à l’Assemblée nationale. L’instabilité ministérielle est importante. Il devient finalement impossible de construire une majorité stable à cause des problèmes  géopolitiques  en  Afrique  du  Nord  (indépendance  négociée  du Maroc et de la Tunisie en mars 1956).
  • La question des colonies se pose très vite. D’abord, la France réprime les revendications indépendantistes de ses colonies. Le 8 mai 1945, les manifestations de Sétif et Guelma en Algérie sont réprimées. Le général Leclerc est envoyé en Indochine pour s’opposer à l’indépendance (les Indochinois ont proclamé leur indépendance en 1945).
  • En 1946, la France associe les colonies dans l’« Union française » (organisation politique qui associe la métropole et les départements d’outre-mer aux colonies) mais n’envisage pas l’indépendance.

 

II.  De la « crise algérienne » à la Ve République

 

A. L’agonie de la IVe République

 

  • Le 1er novembre 1954, le Front de libération nationale (FLN) proclame l’indépendance et commet une série d’attentats. C’est le début de la guerre d’Algérie. Le FLN s’engage dans une lutte armée radicale contre la France mais aussi contre les Algériens indépendantistes modérés menés par Messali Hadj (attentats, tortures…).  La guerre (répression, torture, mobilisation de plus d’1,5 million de soldats français) divise les partis politiques. La désignation comme président du Conseil de Pierre Pflimlin, favorable à une solution négociée en Algérie, provoque la colère des partisans de l’Algérie française. Le 13 mai 1958, de grandes manifestations à Alger donnent lieu à un coup de force de l’armée qui demande le retour du général de Gaulle au pouvoir à Paris.
  • Après la manifestation insurrectionnelle du 13 mai 1958 à Alger, une crise politique majeure éclate : le Président du Conseil, Pierre Pflimlin, démissionne le 28 mai.
  • Malgré une opposition politique fondée sur la peur d’un coup d’État, menée notamment par Pierre Mendès France, le Président de la République, René Coty, appelle Charles de Gaulle pour le remplacer. Le 2 juin 1958, l’Assemblée nationale lui donne les pleins pouvoirs pour modifier les institutions. La Vème République est approuvée par référendum (vote direct du corps électoral, appelé à répondre par « oui » ou « non » à la question posée) en octobre 1958.

 

B. La Ve République et la fin de la guerre d’Algérie

 

  • De Gaulle obtient le 2 juin les pleins pouvoirs pour  6  mois  avec pour  mission  de  réformer  la  Constitution  et  de  résoudre  la  question algérienne. Il met en place la Ve République. La Constitution, adoptée par  référendum,  instaure  un  régime  semi-présidentiel  qui  remplace le régime parlementaire de la IVe République. En décembre 1958, de Gaulle est élu président de la République par les grands électeurs. À partir de 1962, l’élection du président de la République se fait au suffrage universel direct. Les partisans de l’Algérie française sont déçus par la politique de de Gaulle qui a engagé des négociations avec le FLN alors qu’il semblait favorable à l’Algérie française. Réélu en 1965, de Gaulle renforce la présidentialisation (évolution du régime conduisant à concentrer les pouvoirs entre les mains du Président au détriment du Parlement) du régime par une forte présence médiatique.
  • Le « putsch des généraux » à Alger le 22 avril 1961 ou les attentats commis par l’Organisation armée secrète (OAS) en 1961-1962 ne permettent pas de maintenir de force l’Algérie française. Finalement les accords d’Évian entre la France et le FLN sont signés le 19 mars 1962 : ils proclament un cessez-le-feu. L’Algérie est indépendante le 5 juillet 1962 : près d’un million de pieds-noirs et des dizaines de milliers de harkis quittent l’Algérie pour la France.

 

C. Les mémoires blessées de la guerre d’Algérie

 

  • Les mémoires de la guerre d’Algérie sont multiples (mémoires du FLN, des harkis, des pieds-noirs, des membres de l’OAS, des soldats français…). Chaque groupe sort du conflit avec des mémoires blessées.   Afin d’éviter toute tension dans la société, la Ve République organise une politique de l’oubli. Mais les mémoires sont partiellement enfouies : elles donnent parfois lieu à une « guerre des mémoires » entre groupes mémoriels en mal de reconnaissance.  Il faut attendre 1999 pour que la Ve République reconnaisse qu’il s’agit d’une guerre au sein de départements français et non plus simplement d’opérations de maintien de l’ordre.
  • De nos jours, la tendance est plutôt à l’apaisement mémoriel par la reconnaissance officielle des différentes mémoires. Néanmoins, certains points restent encore sources de tensions (reconnaissance des harkis, célébration des accords d’Évian).

 

III. « Une certaine idée de la France » (De Gaulle)

 

A. L’indépendance nationale

 

  • En 1962, la France n’est plus une puissance coloniale (les autres territoires français d’Afrique sont décolonisés en 1960) mais elle se maintient comme puissance mondiale, notamment grâce à la dissuasion nucléaire (bombe atomique en 1960).  De Gaulle s’oppose à la domination des deux superpuissances et mène une politique d’indépendance nationale. La France reste néanmoins au sein de l’Alliance atlantique et du bloc de l’Ouest.  De Gaulle refuse que la CEE mette en place une politique européenne fédérale remettant en cause la souveraineté française. Favorable à la coopération entre pays européens, notamment à partir du « couple franco-allemand » (traité de l’Élysée en 1963), il s’oppose à toute progression vers davantage de supranationalité au sein de la CEE.
  • De Gaulle s’oppose fermement à l’entrée du Royaume-Uni dans la CEE en pratiquant la « politique de la chaise vide » (politique européenne menée par la France pour empêcher l’entrée du Royaume-Uni dans la CEE). Il entreprend de grandes tournées diplomatiques, comme en Amérique latine en 1964. Puissance nucléaire dès 1960, la France prend ses distances avec les États-Unis et quitte le commandement intégré de l’OTAN en 1966.

 

B. La modernisation du pays

 

De Gaulle défend l’action d’un État entrepreneur qui accorde des aides publiques aux groupes industriels, investit dans l’informatique et l’aérospatiale : programmes franco-britannique du Concorde (1962) et franco-allemand d’Airbus (1967).   Pendant les « années de Gaulle » (1958-1969), la France entre dans la société de consommation et connaît une forte croissance du PIB. Cette prospérité est liée à la politique économique gouvernementale (contrôle de l’inflation, création du « nouveau franc » en 1960, planification économique, investissements productifs), mais elle profite aussi de la reprise économique mondiale au temps des Trente Glorieuses.

 

C. Les fragilités de la Vème République

 

  • Mais le pouvoir gaullien connaît une certaine érosion. Considérant l’indépendance de l’Algérie comme une trahison, des militaires font une tentative de coup d’état à Alger en 1961 puis l’Organisation de l’armée secrète (activistes opposés à la politique algérienne de de Gaulle et menant des opérations terroristes) commet des attentats en France. En 1962, le couple de Gaulle échappe de justesse à l’attentat du Petit-Clamart. Durant de longues années, le souvenir de la guerre d’Algérie est douloureux et divise les Français.
  • La guerre d’Algérie (1954-1962) provoque des conséquences multiples en France.
  • La présidentialisation de la Vème République suscite également des oppositions, dont celle de Pierre Mendès France à l’encontre du général de Gaulle. En 1967, la gauche progresse aux élections législatives, soutenue par de nombreux Français face aux inégalités sociales.

  • En mai 1968, une crise étudiante et ouvrière éclate. Début mai, la contestation se répand parmi les étudiants parisiens. Le 13 mai, une grande manifestation, suivie par l’appel à la grève générale, transforme le mouvement en une crise sociale majeure : neuf millions de personnes y participent. La crise devient alors politique : de Gaulle y met fin en annonçant la dissolution de l’Assemblée nationale. Ayant eu peur du désordre, les Français renforce la majorité gaulliste.
  • Mais le renouveau gaulliste échoue. Encouragé par la victoire des gaullistes aux élections législatives de juin 1968, de Gaulle renoue avec la pratique du référendum en avril 1969 : mais il est désavoué et il présente sa démission. Georges Pompidou, son ancien Premier ministre, lui succède à l’Élysée. Son Premier ministre, Jacques Chaban-Delmas, met en œuvre une politique sociale plus ouverte aux aspirations des Français. En 1972, il est remplacé par Pierre Messmer, très vite confronté à la crise économique qui éclate en 1973. En 1974, les difficultés s’accroissent encore avec la mort du président Pompidou en plein mandat.

 

 

  • Sous la IVème République, la France tente de reconstruire sa puissance : elle lance la reconstruction économique, s’allie avec les États-Unis dans la Guerre froide, s’engage dans la construction européenne mais elle a encore du mal à accepter l’indépendance de ses colonies.
  • À partir de 1958, le retour de de Gaulle au pouvoir dans le contexte de la guerre d’Algérie amorce un nouveau régime, la Vème République, et renforce la puissance internationale du pays : membre permanent du Conseil de Sécurité de l’ONU, la France est une puissance nucléaire qui stabilise sa situation politique (elle accepte l’indépendance de la guerre d’Algérie) et modernise l’économie dans le contexte des « Trente Glorieuses ».

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Date de dernière mise à jour : 09/03/2023

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