L'impact de la crise de 1929

Connaissances

En quoi la crise de 1929 provoque-t-elle des déséquilibres profonds aux États-Unis puis dans le reste du monde ?

 

Le jeudi 24 octobre 1929, à la bourse de Wall Street à New York, se produit le « Jeudi noir ».

• Avec ce krach boursier, l’économie mondiale connaît une violente crise (événement ponctuel marqué par un ralentissement de l’activité économique) entraînant une longue dépression (phénomène de longue durée qui suit la crise qui se manifeste par un repli de l’activité économique et un maintien du chômage à un niveau élevé). La crise, née aux États-Unis, se diffuse rapidement au reste du monde. Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate, la plupart des pays n’en sont pas remis.

Les démocraties occidentales hésitent sur les solutions à apporter : politique libérales traditionnelles ou renforcement de l’intervention de l’État ? Mais l’échec de la concertation internationale et le repli des pays accentuent la dépression : le monde des années 1930 est marqué par la montée de régimes autoritaires et totalitaires, dont certains (comme l’URSS et l’Allemagne) semblent s’en sortir.

 

 I. D’une crise étatsunienne à une crise mondiale

 

A. Une crise due à des déséquilibres

 

  • Aux États-Unis, les dangers des crédits à la consommation et de la spéculation* (achat d’actions pour obtenir un gain rapide en les revendant à un cours plus élevé) sont pointés dès 1927. En Europe, au contraire, l’importance de l’épargne et la faiblesse du pouvoir d’achat maintiennent la consommation des ménages à un niveau faible. De ce fait, les stocks industriels s’accumulent dans les pays industrialisés et la surproduction agricole apparaît en Amérique latine dès 1927.
  • Le Royaume-Uni et la France connaissent des déséquilibres financiers, quand ils rétablissent la convertibilité de leur monnaie en or (en 1925 pour la livre sterling et en 1928 pour le franc). La surévaluation monétaire dessert leurs exportations. L’Allemagne dépend des capitaux étrangers après l’inflation* (très forte augmentation des prix) qui l’a frappée dès 1923. Quand les États-Unis retirent leurs capitaux en 1929, l’Allemagne est obligée de pratiquer une déflation (réduction des revenus pour rétablir l’équilibre budgétaire et soutenir la monnaie) très sévère.

 

B. Une crise qui apparaît aux États-Unis

 

  • Le 24 octobre 1929 est le « jeudi noir » à la bourse de New York : 13 millions d’actions sont mises sur le marché sans trouver d’acheteurs. La valeur des actions s’effondre : c’est le krach boursier de Wall Street. Un krach* désigne l’effondrement brutal du cours des actions à la bourse. Depuis 1926, il était possible d’acheter des actions en empruntant 90% de leur valeur. Mais, en août 1929, la hausse des taux d’intérêt provoque l’éclatement d’une bulle spéculative* (hausse démesurée du cours d’une action, sans lien avec la croissance réelle de l’économie).
  • La crise boursière ne touche directement qu’un million d’Américains. Mais elle s’étend aux banques, dont les plus fragiles font faillite (comme la Bank of United States en 1930) parce que les spéculateurs ruinés ne peuvent plus rembourser leurs dettes et parce que les épargnants paniqués retirent leurs capitaux. Alors que les crédits se tarissent, l’investissement s’effondre et la consommation diminue. De 1929 à 1932, la production industrielle des États-Unis recule de 50%. Les entreprises, dont les stocks s’accumulent, déposent le bilan, ce qui engendre une forte hausse du chômage et un net ralentissement de la consommation des ménages.

 

 

C. Une crise qui se diffuse dans le monde

 

  • L’interdépendance des économies et la place des États-Unis causent l’extension rapide de la crise en Europe. Les détenteurs de capitaux américains réduisent leurs investissements à l’étranger et rapatrient leurs placements. En mai 1931, se produit la faillite de la Kreditanstakt, principale banque autrichienne, ainsi que quatre banques allemandes. La crise part du secteur financier et gagne tous les autres secteurs de l’activité. La France, moins dépendante du commerce international, est atteinte plus tardivement mais durablement.

  • Hors d’Europe, les pays d’Amérique latine sont rapidement touchés du fait de la contraction du marché aux États-Unis et de la baisse des prix des produits agricoles que les pays latino-américains exportent en masse (le prix du café baisse de 45%). Seule l’URSS semble échapper à la crise, au moment où Staline lance la collectivisation* (appropriation des moyens de production par l’État). Mais la contraction du commerce mondial est d’autant plus forte que de nombreux pays choisissent de protéger leur production nationale en renforçant le protectionnisme* (mise en place de barrières douanières pour limiter les importations étrangères). Entre 1929 et 1933, la valeur du commerce mondiale diminue de plus des deux tiers.

 

 II. Des déséquilibres économiques et sociaux

 

A. L’explosion du chômage de masse

 

  • L’effondrement de la production touche d’abord les secteurs issus de l’Âge industriel (automobile…), entraînant la destruction massive d’emplois d’ouvriers. Dans les pays industrialisés, plus de 30 millions de personnes sont au chômage (situation caractérisant des personnes privées d’emploi et en cherchant un) en 1932, contre 10 millions en 1920. Les États-Unis concentrent à eux seuls 13 millions de chômeurs. L’ampleur des chiffres traduit le chômage de masse (situation où le chômage augmente fortement et atteinte un taux très élevé).

  • Excepté au Royaume-Uni, qui a créé une allocation chômage en 1911, les chômeurs ne bénéficient d’aucune aide et sont plongés dans la misère. Beaucoup perdent leur logement, sont réduits à la mendicité et survivent grâce à la soupe populaire. Des bidonvilles apparaissent dans les villes américaines. Les mariages et la natalité régressent tant les perspectives d’avenir sont sombres. Des cortèges de déshérités se multiplient pour alerter les pouvoirs publics : en France, les chômeurs organisent des « marches de la faim » pour exiger « du travail et du pain ».

 

B. Un fort malaise dans les campagnes

 

  • Contrairement à l’industrie, l’offre de produits agricoles se maintient voire augmente. La chute des prix des matières premières incite les agriculteurs à produire plus pour compenser la perte de revenus. Mais la surproduction accentue la chute des cours agricoles. Certains agriculteurs refusent de vendre leur production à un prix dérisoire et préfèrent la détruire alors même que des millions de personnes manquent de nourriture.

  • Endettés pour moderniser leur exploitation, certains farmers américains sont contraints de céder leur terre à bas prix et de migrer vers la Californie, qu’ils perçoivent comme un paradis où ils pourront trouver la prospérité. La situation des Okies, les habitants de l’Oklahoma qui prennent la Route 66, a été immortalisée par les célèbres photographies de Dorothea Lange, chargée par la Farm Security Administration, de témoigner de la difficile situation des paysans. En France, les paysans sont durement touchés par la chute des prix (de 50 à 60%).

 

C. Des inégalités qui créent des tensions

 

  • Si les victimes de la crise sont nombreuses, certains sont épargnés voire avantagés par la situation. Les propriétaires fonciers et immobiliers et ceux qui conservent leur emploi bénéficient d’une augmentation de leur niveau de vie liée à la baisse des prix. Le sentiment d’injustice se répand, pouvant déboucher sur des mouvements de violence. En 1932, à Deaborn, dans la banlieue de Détroit, des manifestants viennent présenter leurs revendications au maire. Mais la police municipale tire et quatre manifestants sont tués.
  • Le désastre social remet en cause le fondement même de la démocratie occidentale : le libéralisme. Celui-ci apparaît comme une idéologie dépassée, responsable du déclenchement de la crise et inefficace pour affronter cette-dernière. L’essor de mouvements extrémistes dans tous les pays, à des degrés variables, est ainsi le corolaire de la crise. Le nazisme en Allemagne, l’antiparlementarisme (opposition au régime parlementaire) en France, le populisme (discours politique qui se développe pendant les périodes de crise et qui prétend défendre le peuple, protéger les « faibles » contre les « puissants ») en Amérique latine et aux États-Unis séduisent des populations variées, unies par le mécontentement social.

 

Vocabulaire

 Action  titre représentant une fraction du capital d’une société anonyme, cessible et négociable dans la bourse où l’entreprise est cotée (certaines actions sont achetées à crédit en ne payant comptant que 10 % de leur valeur)

 Chômage*  inactivité professionnelle

 Crise économique*   dégradation de la conjoncture économique sur une durée plus ou moins longue

 Dow Jones   indice des valeurs de la bourse de New York, basé sur le résultat des 30 plus importantes entreprises étatsuniennes

 Krach*  (mot allemand qui signifie « craquement ») : effondrement du cours des valeurs ou des marchandises d’une bourse

 Spéculation*   opération consistant à acheter des valeurs et des marchandises en vue d’obtenir rapidement un gain d’argent lors de leur revente à un prix plus élevé

 Coup d’État   renversement d’un pouvoir politique légitime de manière illégale

 

 Dépression*  phénomène de longue durée marqué par un effondrement économique et le maintien d’un chômage élevé

 Dévaluation   abaissement par un État de la valeur légale de sa monnaie pour favoriser les exportations

 Protectionnisme*   politique commerciale menée par un État afin de limiter les importations sur son marché national, généralement par une augmentation des droits de douanes

 Front populaire*  alliance électorale des partis de gauche (SFIO socialiste, Parti communiste français, Parti radical) pour les élections législatives du printemps 1936

 Grève  : cessation volontaire et collective du travail par les salariés.

 Ligue  organisation d’extrême droite luttant contre le régime parlementaire dans la France de l’entre-deux-guerre

 État-providence*   État qui protège sa population contre les risques de la vie, généralement la vieillesse, le chômage, la maladie et les accidents du travail

Date de dernière mise à jour : 05/09/2022

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