Histoire, périodisation, représentation du temps

Connaissances

Découper le temps en France

Comment s’est développée notre façon actuelle de découper le temps en France ?

 

 I. Le temps a sa propre histoire 

 

➤ Il existe différentes manières de penser le temps.

- la conception linéaire : il a un début et une fin. Nous le représentons donc sous forme de frise. Nous considérons généralement le temps comme source de progrès. D’autres conceptions existent :

- la conception cyclique : une force supérieure garantit un retour à l’identique une fois un cycle terminé (ex : dans l’Empire Aztèque, en Inde, etc.). Le temps est alors figuré par un cercle.

- la conception décliniste : le temps est une force qui éloigne les hommes des Dieux (ex : le mythe grec des « 5 âges » débutant par l’âge d’or où les hommes vivaient comme les Dieux, dans l’abondance, et s’achevant par l’âge de fer, celui de travail). 

- la crise de la conception optimiste : notre conception « progressiste » s’est surtout forgée au XIXème siècle (sous l’effet des transformations rapides : Révolutions industrielles, progrès de la médecine, etc.). Mais le XXIème siècle semble marquer en Occident une « crise du progrès » : le réchauffement climatique est perçu comme le signe d’un déclin à venir. 

 

➤ Toutes les sociétés ne choisissent pas la même date pour marquer le début d’un calendrier, et donc de leur histoire. C’est un choix culturel :

- l’ère chrétienne (débute le calendrier par la naissance J.-C.) est largement utilisée au XXIème siècle. Elle n’est adoptée qu’au Xème siècle. Auparavant on datait en Occident selon le « style romain » (en nombre d’année des règnes des souverains). 

- dans le monde musulman, le calendrier débute par l’Hégire (fuite de Mahomet de La Mecque), correspondant à l’an 622 du calendrier chrétien.

 

 II. Un héritage historique multiple 

 

➤ L’héritage romain. Le calendrier romain républicain compte le temps en années solaires, constituées de 355 jours, divisées en douze mois chacune. Ce système oblige à ajouter régulièrement un treizième mois pour que l’année ne se décale pas par rapport aux saisons. En 46 av. J.‑C., Jules César crée un calendrier de douze mois appelé le calendrier julien. Les mois durent de 29 à 31 jours, et un jour est ajouté en février lors des années bissextiles. Nous héritons du calendrier julien le découpage en années et en mois, ainsi que les noms des mois et des jours. Par exemple juillet pour Jules César et août pour son successeur Auguste, jeudi pour Jupiter, le roi des dieux, ou encore vendredi pour Vénus, la déesse de l’amour.

➤ L’héritage chrétien. Le christianisme se développe progressivement dans l’Empire romain et récupère donc les cadres romains de mesure du temps. Puis, dans les premiers siècles du Moyen Âge, les clercs travaillent à christianiser le temps. Au VIe siècle, le moine Denys le Petit calcule la date de la naissance du Christ, qu’il situe 753 ans après la fondation supposée de Rome. Cela lui permet de considérer qu’il vit un peu plus de cinq siècles après le Christ. Aux IXe et Xe siècles, cette ère chrétienne est progressivement acceptée par les historiens et les chroniqueurs, qui prennent alors l’habitude de dater les événements et les règnes des souverains par rapport à la naissance du Christ. Les fêtes chrétiennes, souvent calquées sur des fêtes païennes, rythment l’année : notamment Noël, qui célèbre l’incarnation du Christ le 25 décembre, et Pâques, qui célèbre sa résurrection, une fête mobile ayant lieu le premier dimanche après la pleine lune qui suit l’équinoxe de printemps. La dernière modification majeure a lieu en 1582, lorsque le calendrier grégorien entre en vigueur pour corriger la répartition des années bissextiles. Les héritages de cette période de christianisation du calendrier restent nombreux aujourd’hui.

➤ L’héritage contemporain. Des héritages plus récents sont venus s’ajouter à notre calendrier. On célèbre par des jours fériés les épisodes fondateurs de notre régime actuel, tels que la prise de la Bastille du 14 juillet 1789, symbole de la Révolution française, ainsi que la fête du Travail tous les 1er mai, qui commémore et poursuit la lutte des travailleurs et travailleuses pour la défense de leurs droits. S’y ajoutent les commémorations de victoires militaires : l’armistice du 11 novembre 1918, qui met fin à la Première Guerre mondiale, et la capitulation allemande du 8 mai 1945, qui met fin à la Seconde Guerre mondiale. Ces commémorations, surtout pour la Première Guerre mondiale, tendent désormais à prendre la forme moins d’une célébration de l’armée que d’un moment de mémoire partagée, en considérant que ces guerres font partie d’un héritage européen porté en commun.


Conclusion / Notre calendrier continue donc à évoluer en s’adaptant aux transformations politiques, sociales et culturelles.

 III. Des tranches d’histoire entre coupure et continuité 

➤ Les échelles du temps. Les historiens utilisent une série de mesures pour se repérer dans le temps. Cela s’appelle le découpage décimal. Un millénaire est une période de mille ans : le premier millénaire après Jésus‑Christ va donc jusqu’à l’an mil, le deuxième millénaire jusqu’à l’an 2000. Les siècles désignent une durée de cent ans, nommée en se situant dans le siècle en cours. Par exemple, la fin de l’Empire romain en 476 se situe à la fin du Ve siècle, la prise de Constantinople en 1453 se situe à la moitié du XVe siècle, etc. Pour entrer dans une chronologie plus fine, on utilise les décennies. Par exemple, les années 1870 désignent les années de 1870 à 1879. Quand on parle des « années 30 » ou des « années 80 » sans préciser le siècle, on fait généralement référence au XXe siècle.

Cependant, des repères plus subjectifs, avec des découpages en périodes courtes, existent aussi. On peut désigner le règne d’un roi comme une période cohérente : par exemple, on peut dire que la Renaissance se développe « sous le règne de François Ier » (1515‑1547). On peut également employer des chrononymes* qui renvoient à de grands événements : « l’entre‑deux‑guerres » désigne la période située entre la Première et la Deuxième Guerre mondiale (1918‑1939), les années 1900‑1914 sont appelées « la Belle Époque ». Connaître ces expressions permet de se repérer dans l’histoire.

Le temps ne se divise pas de lui-même : les « grandes coupures » sont utiles pour l’historien. Mais …

Elles résultent de choix. Des dates différentes sont parfois proposées pour servir de « bornes » aux périodes : on peut dater la fin de l’Antiquité de 476, ou bien de 496 en France (baptême de Clovis, roi des Francs), etc. Ailleurs, les bornes sont différentes.

➤ Le rôle des grandes coupures. En France, l’histoire est traditionnellement divisée en quatre grandes périodes, séparées entre elles par des événements jugés suffisamment importants pour entraîner des transformations profondes. L’Antiquité commence avec la naissance de l’écriture au IVe millénaire av. J.‑C. et s’achève avec la fin de l’Empire romain d’Occident en 476. Le Moyen Âge dure jusqu’à la découverte de l’Amérique en 1492, qui marque le passage dans l’époque moderne. Enfin, l’époque contemporaine commence avec la Révolution française en 1789 et se prolonge jusqu’à nous. Le choix de ces coupures est proprement français. Chaque pays adapte son calendrier et ses coupures historiques en fonction de son histoire.

Frise 3 bis

➤ Le poids des continuités. Ces divisions sont utilisées pour des raisons de commodité, mais de profondes continuités existent d’une période à l’autre. La fin de l’Antiquité et le début du Moyen Âge sont marqués par la disparition de l’Empire romain au profit des royaumes barbares. Mais ces deux périodes restent unies par un maintien de la langue latine, de la culture romaine et de la religion chrétienne.

De même, le début de l’époque moderne est marqué par la Renaissance, mais pour la majorité paysanne de la population, peu de choses changent : ils vivent dans ce que l’historien français Jacques Le Goff a appelé « un long Moyen Âge », qui s’étend jusqu’au XVIIIe siècle.

Enfin la Révolution française abolit la monarchie absolue et cherche à créer un régime nouveau, appuyé sur les idéaux de liberté et d’égalité. Cependant au XIXe siècle se succèdent en France une restauration de la monarchie, deux empires et deux autres républiques. La République ne s’installe donc en France de manière pérenne qu’en 1870.

 

Les coupures induisent en erreur. Car au-delà des évènements choisis pour découper l’histoire, de grandes continuités (ce qui persiste dans le temps) existent entre les périodes :

- la date de 1492 pour marquer la fin du Moyen-âge (découverte de l’Amérique) masque le fait que le quotidien reste inchangé pour la majorité paysanne d’Europe. 

- la date de 1789 pour marquer la fin de l’Epoque moderne (début de la Révolution française) masque le fait que la monarchie a été restaurée au XIXème siècle. Ce n’est qu’en 1870 que la République s’est instaurée durablement en France.

- à l’inverse, quoi de commun entre la France de 1800 et celle d’aujourd’hui ?

Certains remettent en cause la pertinence d’une « Epoque contemporaine ». C’est pourquoi à la fin du XXème siècle est apparue une nouvelle périodisation : « le temps présent » (période mobile correspondant à celui des témoins encore vivants).

 

Conclusion / Les découpages chronologiques sont des outils utiles pour se repérer, mais il faut envisager l’histoire sur la longue durée. En effet, l’histoire est une combinaison complexe de continuité et de changement : ce n’est pas une simple « suite d’évènements ».

Activités

Activité 1

Titre site la periodisation en debat 1

Activité 2

Titre site les autres decoupages

Vocabulaire

La périodisation désigne le fait de diviser le temps en périodes.

Une période est un segment de l’histoire qui se distingue des autres par des caractères propres

Une période canonique : c’est le découpage de l’histoire en quatre périodes : l’Antiquité, le Moyen Âge, les Temps modernes, l’époque contemporaine.

Chrononyme : nom donné à une période historique pour mettre en avant ce que l'on considère comme sa spécificité (ex. : le siècle de Périclès).

Une frise chronologique : une bande graduée représentant le déroulement du temps, qui se termine par une flèche et sur laquelle sont placés des événements avec leurs dates (qui servent parfois de ruptures chronologiques) et des périodes.

Le calendrier grégoriencalendrier imposé en 1582 par le pape Grégoire XIII pour éviter le décalage de l’année par rapport aux saisons.

Date de dernière mise à jour : 22/08/2022

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